Traduit de l'anglais par Tom
Les espèces d'apistogramma et les
petits cichlasoma dominaient mes aquariums, mais en me rendant à Cleveland
pour la " Ohio Cichlid Association Cichlid Extravaganza " je n'en trouvait
aucun sur le tableau d'affichage de la salle d'exposition.. Tout ce que j'ai trouvé
c'était des cichlidés nains du genre Crenicichla, que je suis allé
observer par curiosité. Après avoir contemplé trois couples
de Crenicichla regani Ploeg, 1989, j'ai décidé d'en acquérir
un. A ce moment, je pensai simplement qu'ils feraient un bel effet dans un grand
bac d'exposition, et que j'aurai quelque chose d'original à montrer aux
membres du club.
Ayant toujours entendu dire que les petits
Cichlasoma n'acceptaient que de la nourriture vivante, j'achetais deux douzaines
de guppys et les plaçais avec les Crenicichla dans un 150 L pour qu'ils
grandissent ensemble. Une demi-douzaine de pots de fleur de 8 cm de diamètre
environ furent également plaçés à différents
endroits du bac. J'ai découpé une ouverture dans chacun d'eux, juste
assez large pour que les poissons puissent y entrer, comme j'avais déjà
l'habitude de les faire pour mes apistos. J'ai également ajouté
quelques mops flottants pour killies avec une grosse mousse de Java. Aucun gravier
ou autre type de substrat dans le bac, mais deux filtres de type " Jumbo
" à bulle complétaient l'installation. Tout ce qu'il me restait
à faire était de m'asseoir, et de regarder les combats qui commencèrent
rapidement, en pensant qu'ils allaient finir par s'entretuer tôt ou tard.
Le mâle chassait la femelle; elle me faisait tellement pitié que
j'ai enlevé le mâle pour le placer dans un bac adjacent, puis je
les ai oubliés. Après deux mois, je les ai surpris en train de s'observer
à travers les vitres.
Puisqu'ils avaient l'air
de s'intéresser l'un à l'autre, j'ai replacé le mâle
dans le bac principal, mais en plaçant une vitre de séparation pour
l'isoler de la femelle. Les deux étaient nourris avec des artémias
vivantes et surgelées qu'ils acceptaient parfaitement. A ce moment là,
le couple était maintenu dans de l'eau de conduite, d'une dureté
de 170 ppm de pH 7.5 et à une température de 26°C. Puis j'ai
réalisé un changement d'eau de 80 %, en remplaçant l'eau
du robinet par de l'eau osmosée (après l'avoir laissée reposer)
à 22°C. Ce changement drastique a rapidement baissé la température
de l'aquarium à 23°C, la dureté à 40 ppm et le pH à
6.0. Durant les deux jours suivants, la température est retournée
à 26°C et le ventre de la femelle a développé une teinte
rosée. La séparation a donc été retirée et,
puisqu'il n y avait aucun signe de violence, je les ai laissés ensemble
toute la nuit. Le lendemain matin, je trouvais le mâle en train de patrouiller
à travers le bac, mais aucune trace de la femelle. Quelques heures plus
tard, commençant à m'impatienter, j'ai commencé à
soulever les pots, pour retrouver sa carcasse - je craignais le pire - mais j'ai
été enchanté de la retrouver sous l'un d'eux, en train de
garder une grappe d'ufs beiges accrochés par des fils fins et courts.
J'ai immédiatement transféré le mâle dans son précédent
bac. Rien d'autre n'a été observé durant les cinq jours qui
suivirent avant que je ne trouve des alevins sous le pot, gardés attentivement
par la femelle.
Pendant ce temps, le mâle avait
atteint environ 10 cm, et la femelle 8. Il était clair en surface avec
une ligne latérale noire ; la nageoire dorsale pointue ainsi que la nageoire
anale étaient orange pâle, borées de bleu-noir. La femelle
avait des nageoires plus arrondies ; la nageoire dorsale comportait une tâche
noire, avec un bord blanchâtre qui faisait contraste. Cinq jours plus tard,
j'ai enfin pu observer les alevins nageant en groupe à travers l'aquarium,
serrés comme dans une petite école tenue par la femelle. Je leur
donna alors des nauplies d'artémia fraîchement écloses, et
pus observer quelques temps après leur ventre rose et distendu. Les guppys
du début étaient pour la plupart toujours là et n'étaient
pas embêtés; par contre leurs alevins disparaissaient aussi vite
qu'il naissaient. Après seulement deux mois, les alevins de crenicichla
faisaient déjà 2 cm de longueur, et furent donc déplacés
dans leur propre bac ou l'eau était progressivement coupée avec
de l'eau du robinet. Les parents furent réunis, et je n'eu pas à
déplorer de combats depuis. La femelle gardait les ufs et les jeunes
alevins, et le mâle intervenait pour s'occuper du frai au stade de la nage
libre. J'ai été enchanté par cela, car je pense qu'il n y
rien de plus beau en aquariophilie, que de voir un couple responsable, s'occupant
de leurs jeunes à travers un bac. Je regrettai de ne pas avoir acheté
les trois couples à l'exposition, mais je ne pensai pas qu'ils pondraient.
J'ai depuis appris que mon couple est le seul des trois à avoir survécu.
Huit mois après leur anniversaire, les F1 ont pondu et
élèvent leurs alevins dans de l'eau courante. Une chose que j'ai
remarqué est que chaque individu, mâle et femelle, est unique en
apparence. Il est aussi intéressant de noter que certains alevins sont
beaucoup plus colorés que leurs parents. Pour le moment, le couple original
n'a pas plus grandi, mais la femelle a désormais quatre tâches
noires entourées par une bande blanche, sur la nageoire dorsale. Chez
les femelles nées cette année, les dessins de la nageoire sont
très variables (voir Warzel, 1996).
J'ai appellé Crenicichla regani
le "gentil brochet", parce qu'une douzaine d'adultes peuvent très
bien être maintenus dans un bac de 120 L avec quelques autres poissons craintifs,
sans qu'il n y aie de réel problème. Sur une portée de 100
alevins, j'obtenais environ 65% de mâles, ce qui n'est pas si mal bien que
les femelles soient beaucoup plus jolies. Je n'ai pas de bac communautaire, mais
je pense que ce " gentil brochet " serait le bienvenue dans un bac de
petits ou moyens cichlidés sud-américains.
Un
grand merci à Mike Zebrowski, du Michigan, pour avoir péché
les poissons sauvages dans le Rio Purus (Brésil), et à Wayne Leibel
qui m'a poussé à me procurer au moins un couple à Cleveland.
Bibliographie : Warzel, F. 1996. Variation in Crenicichla regani. The Cichlids Yearbook, Vol. 6 : 74-79.
maj : 22/07/04